La moisson est grande – prédication confinée du 22 novembre 2020

22 novembre 2020

Le Messie, le Sauveur d’Israël regarde son peuple, et il voit des brebis qui n’ont pas de berger. Des vies qui n’ont pas de sens. Il voit ce peuple qui porte en lui une promesse, mais une promesse dont il ne trouve pas le chemin. Un peuple promis au bonheur, mais enfermé sans défense et sans fin dans les violences et les souffrances de la mort.

Oh, ce peuple sait pourquoi les promesses de Dieu se refusent à lui. Il sait que la cause en est son péché, dont la loi de Dieu lui inflige l’évidence et la condamnation. Ses prophètes et ses docteurs ne manquent pas de le lui rappeler, de le lui reprocher, sans pour autant pouvoir y remédier… Le désarroi n’en est que plus grand.

Cependant, le Dieu d’Israël ne veut pas la perdition de son peuple, mais sa libération. Alors il vient lui-même accomplir sa promesse. Dieu vient lui-même, en Jésus, se faire le berger de son peuple. Dieu lui-même se fait, en Jésus, le chemin qu’il ne pouvait pas trouver ; le salut qu’il ne pouvait pas atteindre.

En Jésus, Dieu rassemble son peuple, appelle ses disciples, et en une phrase, il donne un sens à leur vie. Le sens de la vie. Il leur dit : La moisson est grande, mais il y a peu d’ouvriers. Priez donc le Seigneur de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. Matthieu 9.37-38

Ce passage sans transition de la métaphore ovine à la métaphore agricole est plutôt surprenant. Des brebis envoyées moissonner, cela peut sembler curieux ; cela peut même faire sourire…

Mais ce curieux enchaînement n’a rien de maladroit. Il est volontaire. Il est pour étonner, et faire entendre par cet étonnement la guérison que le Seigneur apporte aux hommes qu’il vient appeler… De ceux-là, qui étaient des brebis perdues, le Sauveur fait des moissonneurs. Voilà la guérison qui s’offre aux hommes en Jésus-Christ.

 

Cette moisson dont parle Jésus signifie le salut de Dieu. Chaque épi moissonné signifie une vie sauvée par la grâce, ramenée de la mort à la vie. (Jn 5.24) Et la moisson dans son ensemble signifie le peuple de Dieu emmené du monde au royaume.

Quelques temps après ces paroles, Jésus raconte la parabole dite « du bon grain et de l’ivraie », pour illustrer la venue du royaume de Dieu… Dans cette parabole, il est question des moissons, que Jésus interprète lui-même en disant qu’elles signifient la fin du monde.  (Mt 13.30, 39) La fin du monde, c’est pour beaucoup une perspective angoissante, une perspective comprise comme l’anéantissement de toutes choses ; mais pour ceux qui sont en Christ, c’est au contraire une Bonne Nouvelle, car cela signifie l’avènement du royaume, le rétablissement sur toutes choses et toutes vies de la souveraineté de Dieu, du règne de son amour. L’Apocalypse de Jean décrit la fin du monde comme l’avènement de la nouvelle Jérusalem, où Dieu habitera avec son peuple, où il essuiera toutes larmes de leurs yeux, où la mort ne sera plus, où il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur… (Ap 21.3)

Seuls le malin, le péché et la mort seront anéantis, mais tous ceux qui auront reçu l’appel de Dieu à se confier en Jésus-Christ, à vivre de sa grâce, seront moissonnés pour la vie éternelle. L’heure est venue de moissonner, car la moisson de la terre est mûre ! proclame le Seigneur ; Levez les yeux et regardez les champs qui sont blancs pour la moisson, dit-il à ses disciples… (Ap 14.15, Jn 4.35)

Mes frères et sœurs, si nous avons reçu le Seigneur Jésus comme notre sauveur, telle est désormais notre vocation, dans le monde : travailler à la moisson du Seigneur. Et cette vocation, cette mission, c’est la guérison que Jésus a accomplie ou veut accomplir en nous, en nous appelant à lui, en moissonnant notre vie : de ceux qui étaient perdus dans le monde, livrés sans défense au prédateur, Jésus fait des ouvriers du salut de Dieu. De celui qui était victime du monde, Jésus fait un bâtisseur du royaume. Voilà en quoi consiste notre salut en Jésus-Christ.

Et cela s’accomplit d’un instant à l’autre, par le seul appel du Seigneur, par le seul miracle de la foi, qui réalise instantanément la promesse en celui qui le reçoit, qui moissonne instantanément sa vie pour le royaume.

Jésus, le bon berger, redonne sens à ce qui n’en avait plus ; à ce qui ne pouvait plus en avoir. Non, tu ne vis pas pour mourir, mais pour aimer, parce que je t’aime ! te révèle le Seigneur ; et l’amour ne meurt jamais. (1 Co 13.8) La guérison, en Jésus-Christ, c’est de croire en cela, et de le vivre, dès maintenant. De vivre le royaume, même s’il nous faut encore le vivre dans le monde.

 

Beaucoup se questionnent, sans fin, sur le sens de leur vie… Qu’est-ce que je fais, qu’est-ce que je vais faire dans ce monde ? Ces paroles de Jésus apportent la réponse.

Le sens de notre vie dans ce monde, c’est de travailler à la moisson du Seigneur. Si aujourd’hui il nous faut encore vivre le royaume dans le monde, y subir encore la méchanceté du malin et l’infection du péché, c’est pour accomplir en Christ le rassemblement de son peuple. C’est pour cela qu’il nous a donné son Esprit, qui fait de nous ses frères : Pour être ses témoins – porter son appel – jusqu’aux extrémités de la terre. (Actes 1.8)   

Bien sûr, nous préférerions habiter déjà la nouvelle Jérusalem, la création délivrée des violences et des souffrances du péché, délivrée du malin, comme nous le prions avec Jésus… (Mt 6.13) La Bible elle-même exprime ce désir, par la bouche de Paul, qui confie aux chrétiens de Philippe : J’ai le désir de m’en aller et d’être avec Christ, mais à cause de vous – c’est-à-dire, pour vous apporter l’Évangile du Seigneur – il est plus nécessaire que je demeure dans la chair. (Phi 1.23-24) Mon salut, c’est aujourd’hui ma mission pour vous.

Le sens, tout le sens de notre vie dans le monde, c’est de travailler à la moisson du Seigneur, au rassemblement de tous les siens. Notre guérison en Christ, c’est notre mission à l’œuvre de son salut.

Si Jésus est venu nous appeler, nous sauver, ce n’est pas pour que nous puissions réaliser le projet qui était le nôtre avant de connaître le Seigneur ; c’est-à-dire le projet que le malin nous avait inspiré… Le Seigneur n’est ni un dépanneur, ni un guérisseur ; il est le Sauveur. S’il est venu nous appeler, c’est pour qu’ensemble et avec lui nous réalisions son projet, c’est pour que nous pratiquions les œuvres bonnes qu’il a préparées pour nous, dans son œuvre de salut. C’est pour que sa volonté soit faite sur la terre comme au ciel. (Éph 2.10, Mt 6.10)

Et toutes les œuvres qui sont la volonté du Seigneur se résument en une seule : l’Église. Le sens de notre vie en Christ, dans le monde, c’est d’être ensemble l’Église. L’Église, c’est dans le monde l’œuvre de la moisson. L’œuvre du royaume. Être membres de l’Église, ouvriers dans la moisson, c’est en Christ notre raison d’être dans le monde, notre raison d’être encore dans le monde…

 

C’est pourquoi Jésus nous demande de prier le Seigneur de la moisson d’envoyer des ouvriers dans sa moisson. Cette demande peut étonner, car Jésus est lui-même le Seigneur de la moisson… Pourquoi nous demande-t-il de le prier d’agrandir notre fraternité, d’augmenter notre capacité d’action ? N’est-ce pas lui qui appelle et qui envoie ? La réponse est oui… Et dès lors, nous comprenons que s’il nous demande de prier ainsi, c’est pour nous unir à sa volonté. C’est parce qu’il veut que sa moisson soit notre moisson, que le salut du monde soit notre affaire ; c’est parce qu’il ne veut pas que nous soyons ses outils, mais ses partenaires. En un mot : c’est parce qu’il nous a vraiment sauvés.

Quelle est la raison de sa venue dans le monde ? C’est le salut du monde. En est-il de même pour nous ? Notre volonté, nos projets, sont-ils aujourd’hui pleinement unis, dévoués au projet de Dieu, à la moisson pour laquelle il nous a sauvés ? Est-ce que notre mission, notre Église, c’est tout ce qui nous préoccupe dans le monde, ou avons-nous d’autres raisons de le prier, de le solliciter ? Si c’est le cas, prions-le qu’il nous en délivre, qu’il nous libère de tout ce qui n’est pas sa volonté, de tout ce qui n’est pas pour le royaume. Cherchez d’abord le royaume et sa justice, enseigne-t-il ; employez-vous avant tout et en toutes choses à la moisson du Seigneur, et toutes autres choses, tout ce dont vous aurez besoin pour cela, vous seront données en plus.

Cette prière que Seigneur nous recommande, la prière pour l’Église, c’est la prière qui atteste notre libération. Car la liberté, c’est d’appartenir au projet de Dieu, c’est d’agir en Jésus-Christ. De ne plus dépendre du monde, mais d’être pour le monde les semeurs et les moissonneurs de la grâce et du salut de Dieu…

Car la moisson commence par les semailles… Les semailles, c’est l’appel ; la moisson, c’est la foi. Vivre en Christ dans le monde, c’est semer son appel à ceux qui sont perdus, afin de moissonner, d’accueillir parmi nous ceux qui trouveront en lui le sens de leur vie – et il n’y a rien de mieux à espérer pour quiconque ! Les semailles sont dures, car la terre est aride et l’ennemi est furieux, mais la moisson est joyeuse. Celui qui s’en va en pleurant, quand il porte la semence à répandre, s’en revient avec des cris de joie, quand il porte ses gerbes, annonçait David. (Ps 126.6)

Et quelle que soit l’ampleur, la dureté et les douleurs de notre mission, nous l’accomplissons dans la promesse que Jésus nous a faite : Je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi. (Jn 14.3) Qu’aurions-nous d’autre à espérer ?

Prions pour notre Église, portons résolument notre mission, en ces temps agités… Elle est la barque qui nous emmène au royaume.

 

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